Eoliennes, pieges a rapaces

Lettre ouverte au Commissaire Enquêteur

Enquête publiquesur le projet de centrale éolienne du
Quercy Blanc

Mort prévisible de nombreux rapaces protégés


Monsieur le Commissaire Enquêteur
Projet de parc éolien du Quercy Blanc
Mairie de Castelnau-Montratier
CASTELNAU-MONTRATIER
46170 France

Les rapaces sont en rapide déclin, en France comme dans l’Union européenne. Les éoliennes contribuent à leur forte mortalité dans une mesure beaucoup plus grande qu’il n’est généralement reconnu. C’est pourquoi il est important que les préfets et les autorités environnementales ne permettent pas que l’on implante des éoliennes là où il est prévisible qu’elles tueront ces espèces utiles, déjà décimées par des milliers d’éoliennes en France et dans l’Union européenne. Ces oiseaux ne sont pas protégés par la Loi pour rien, et les préfets manqueraient à leur devoir s’ils n’en tenaient pas compte.

On peut lire dans le rapport du bureau d’études EXEN sur le volet oiseaux du projet éolien Quercy Blanc, page 26 :

« 10 des espèces identifiées sur le site et son entourage sont inscrites à l’annexe I de la Directive Européenne « Oiseaux » n°79/409/CE du 2 avril 1979, dont des mesures de conservation spéciales visent à préserver leurs habitats et leurs populations. Il s’agit :

• de l’Alouette lulu (Lullula arborea)

• de la Bondrée apivore (Pernis apivorus)   —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Bruant ortolan (Emberiza hortulana)

• du Busard des roseaux (Circus aeruginosus)   —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Busard Saint-Martin (Circus cyaneus)  —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Circaète Jean-le-Blanc (Circaetus gallicus)  —> (RAPACE protégé – ndlr)

• de la Grande Aigrette (Ardea alba)

• du Milan noir (Milvus migrans)  —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Milan royal (Milvus milvus)   —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Pic mar (Dendrocopos medius) »

On y lit aussi :

« a) Espèces inscrites sur la liste rouge des espèces nicheuses menacées en France :
7 des espèces identifiées sur le site et son entourage sont considérées comme ayant une population nicheuse vulnérable en France (régression plus ou moins importante). Il s’agit :

• du Bruant ortolan (Emberiza hortulana)

• du Busard des roseaux (Circus aeroginosus)   —> (RAPACE protégé – ndlr)

• de la Linotte mélodieuse (Carduelis cannabina)

• du Milan royal (Saxicola rubetra)  (SIC – ndlr) —> (RAPACE protégé – ndlr)

• du Pipit farlouse (Anthus pratensis)

• de la Sarcelle d’hiver (Anas crecca)

• du Tarier pâtre (Saxicola rubetra) »

Manifestement, le site choisi par le promoteur pour installer ses éoliennes fait partie de l’habitat d’un bon nombre d’espèces de rapaces protégées.

Il s’agit donc d’un habitat naturel important pour la survie des rapaces, en particulier pour les espèces suivantes :

– le Circaète Jean le Blanc (circaetus gallicus), un aigle spécialisé dans la chasse aux serpents, qui se fait souvent tuer par les éoliennes en Espagne (1). Il niche en principe dans la ZNIEFF 730030189 Combe Perdude et Serres de Pern à 2,7 km à l’est du projet éolien. On le voit habituellement dans la zone du projet, qui est dégagée et fait donc partie de son aire de chasse (carte page 48 où l’on voit les vols observés au cours d’environ 50 heures d’observation – 50 h selon le tableau en page 23). Note: le promoteur éolien est propriétaire du rapport préparé par le consultant: il peut donc l’éditer. Par conséquent, il est prudent de considérer les observations reportées sur la carte comme étant un minimum, plutôt qu’un reflet fidèle de la réalité. Cette remarque vaut pour tout ce qu’on peut lire dans les études que nous présentent les promoteurs.

– le Milan Royal (milvus milvus) est une espèce en rapide déclin. En Allemagne, il est estimé “officiellement” que les éoliennes en tuent 300 exemplaires par an (estimation communiquée par Ubbo Mammen dans une réponse à une question orale au Colloque International sur le Milan Royal à Montbéliard, Oct. 2009) – voir aussi (1) et (2). La mortalité réelle pourrait être plus élevée.

Or ce rapace emblématique fait partie des oiseaux qui fréquentent le site du projet, tel qu’en témoigne la carte page 48 basée sur environ 50 heures d’observation (c’est un minimum – voir remarque ci dessus).

– le Busard Saint Martin (circus cyaneus), auquel il arrive de se faire tuer par les éoliennes (1), a été vu sur le site plusieurs fois au cours d’environ 50 heures d’observation (carte p. 48) (c’est un minimum – voir remarque ci dessus). Ce plateau dégagé en partie cultivé fait partie de son aire de chasse (carte p. 53)

– le Faucon Crécerelle (falco tinnunculus), une espèce pas encore « menacée » mais qui est une fréquente victime des éoliennes (1) et qui est protégée par la Loi, a deux nids sur le site (voir carte page 53), qui est aussi son terrain de chasse (carte p. 48).

– le Milan Noir (milvus migrans) a aussi été identifié sur le site (carte p.48), où il vient chasser lui aussi (voir carte page 53). C’est aussi une espèce sensible aux éoliennes (morts assez fréquentes) (1).

– etc.

Ce plateau dégagé, cette ligne de crête où un promoteur veut mettre ses éoliennes, est donc très fréquenté par les rapaces, pour lesquels il est un magnifique terrain de chasse. Il le sera encore plus lorsque les éoliennes seront installées, parce que les rapaces sont attirés par ces hautes structures offrant une vue dégagée,sur lesquelles ils se perchent souvent (3) (5) (6). Il en résultera quantités de collisions avec les pales, comme les statistiques internationales le prouvent (1) (4).

La Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) devrait s’opposer très fermement à un projet éolien aussi mal placé. Si elle ne le fait pas, c’est en raison d’un puissant conflit d’intérêts. Vous aurez remarqué qu’elle ne parle jamais non plus de l’attraction exercée par les éoliennes sur les rapaces, les hirondelles et les martinets (3). Cette attraction est pourtant prouvée par des études scientifiques (Dr Shawn Smallwood et Carl Thelander, 2005 ; Professeur Ingemar Ahlén et al., 2010) (3), par des photos (5) et par deux vidéos (6).

L’Autorité Environnementale (DREAL) ne s’oppose pas vraiment non plus, car d’une part elle est influencée par ce que dit ou ne dit pas la LPO, et d’autre part elle obéit à des consignes transmises par la voie hiérarchique.

Quant aux mesures d’atténuation, de compensation ou d’évitement : depuis qu’on les a vues à l’œuvre, on sait bien qu’elles sont inefficaces. Mais c’est une façon de remercier les bons serviteurs, d’alléger les consciences, et donc d’huiler les gonds de l’autorisation administrative. Une fois le parc éolien en place, la tuerie commencera et rien ne l’arrêtera. Voyez Altamont Pass, en Californie : après 25 ans d’opération, un long massacre de 2 900 aigles royaux, de 15 000 autres rapaces et de centaines de milliers d’autres oiseaux et chauves-souris, les autorités ont donné le feu vert à de nouvelles éoliennes pour 25 années de plus. Une étude partisane a prétendu que les nouvelles machines tueraient deux fois moins d’oiseaux, et cela a suffi comme excuse. L’hypocrisie « verte » n’a pas de limites.

Save the Eagles International s’oppose fermement à ce projet éolien,car à cet endroit si prisé par les rapaces, il deviendrait un piège écologique, détruisant non seulement les oiseaux de proie présents, mais tous ceux qui viendront utiliser leur terrain de chasse après leur mort, année après année.

L’effet cumulatif avec les autres centrales éoliennes, de France et d’Europe, sera catastrophique pour les populations de rapaces. Et par voie de conséquence, les populations de mulots et de rats augmenteront, d’autant que les hiboux et les chouettes sont également décimées par les éoliennes. Les risques de maladies et d’épidémies seront d’autant plus grands. Comme tous les prédateurs, les rapaces attrapent plus facilement les proies en état de faiblesse. Ils contribuent ainsi à la conservation de populations d’animaux en bonne santé.

Veuillez agréer, Monsieur le Commissaire Enquêteur, l’expression de mes sentiments respectueux.